Texte grec :
[1,12] 12. Μᾶρκος δ' Ὀκτάουιος δήμαρχος ἕτερος, ὑπὸ τῶν κτηματικῶν
διακωλύειν παρεσκευασμένος, καὶ ὢν ἀεὶ παρὰ Ῥωμαίοις ὁ κωλύων
δυνατώτερος. Ἐκέλευε τὸν γραμματέα σιγᾶν. Καὶ τότε μὲν αὐτῷ πολλὰ
μεμψάμενος ὁ Γράκχος ἐς τὴν ἐπιοῦσαν ἀγορὰν ἀνέθετο . . . Φυλακήν
τε παραστησάμενος ἱκανὴν ὡς καὶ ἄκοντα βιασόμενος Ὀκτάουιον
ἐκέλευε σὺν ἀπειλῇ τῷ γραμματεῖ τὸν νόμον εἰς τὸ πλῆθος
ἀναγινώσκειν. Καὶ ἀνεγίνωσκε καὶ Ὀκταουίου κωλύοντος ἐσιώπα.
Λοιδοριῶν δὲ τοῖς δημάρχοις ἐς ἀλλήλους γενομένων καὶ τοῦ δήμου
θορυβοῦντος ἱκανῶς, οἱ δυνατοὶ τοὺς δημάρχους ἠξίουν ἐπιτρέψαι τῇ
βουλῇ, περὶ ὧν διαφέρονται, καὶ ὁ Γράκχος ἁρπάσας τὸ λεχθέν, ὡς δὴ
πᾶσι τοῖς εὖ φρονοῦσιν ἀρέσοντος τοῦ νόμου, διέτρεχεν ἐς τὸ
βουλευτήριον. Ἐκεῖ δ' ὡς ἐν ὀλίγοις ὑβριζόμενος ὑπὸ τῶν πλουσίων,
αὖθις ἐκδραμὼν εἰς τὴν ἀγορὰν ἔφη διαψήφισιν προθήσειν ἐς τὴν
ἐπιοῦσαν ἀγορὰν περί τε τοῦ νόμου καὶ τῆς ἀρχῆς τῆς Ὀκταουίου, εἰ
χρὴ δήμαρχον ἀντιπράττοντα τῷ δήμῳ τὴν ἀρχὴν ἐπέχειν. Καὶ ἔπραξεν
οὕτως· ἐπείτε γὰρ Ὀκτάουιος οὐδὲν καταπλαγεὶς αὖθις ἐνίστατο, ὁ δὲ
προτέραν τὴν περὶ αὐτοῦ ψῆφον ἀνεδίδου.
Καὶ τῆς πρώτης φυλῆς καταψηφισαμένης τὴν ἀρχὴν τὸν Ὀκτάουιον
ἀποθέσθαι, ἐπιστραφεὶς πρὸς αὐτὸν ὁ Γράκχος ἐδεῖτο μεταθέσθαι. Οὐ
πειθομένου δὲ τὰς ἄλλας ψήφους ἐπῆγεν. Οὐσῶν δὲ τότε φυλῶν πέντε
καὶ τριάκοντα καὶ συνδραμουσῶν ἐς τὸ αὐτὸ σὺν ὀργῇ τῶν προτέρων
ἑπτακαίδεκα, ἡ μὲν ὀκτωκαιδεκάτη τὸ κῦρος ἔμελλεν ἐπιθήσειν, ὁ δὲ
Γράκχος αὖθις, ἐν ὄψει τοῦ δήμου, τότε μάλιστα κινδυνεύοντι τῷ
Ὀκταουίῳ λιπαρῶς ἐνέκειτο μὴ ἔργον ὁσιώτατον καὶ χρησιμώτατον
Ἰταλίᾳ πάσῃ συγχέαι μηδὲ σπουδὴν τοῦ δήμου τοσήνδε ἀνατρέψαι, ᾧ τι
καὶ παρενδοῦναι προθυμουμένῳ δήμαρχον ὄντα ἥρμοζε, καὶ μὴ αὑτοῦ
τὴν ἀρχὴν ἀφαιρουμένην περιιδεῖν ἐπὶ καταγνώσει. Καὶ τάδε λέγων καὶ
θεοὺς μαρτυρόμενος ἄκων ἄνδρα σύναρχον ἀτιμοῦν, ὡς οὐκ ἔπειθεν,
ἐπῆγε τὴν ψῆφον. Καὶ ὁ μὲν Ὀκτάουιος αὐτίκα ἰδιώτης γενόμενος
διαλαθὼν ἀπεδίδρασκε, Κόιντος δὲ Μούμμιος ἀντ' αὐτοῦ δήμαρχος
ᾑρεῖτο, καὶ ὁ νόμος ὁ περὶ τῆς γῆς ἐκυροῦτο.
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Traduction française :
[1,12] 12. Alors un des collègues de Gracchus, le tribun Marcus Octavius, qui
s'était laissé gagner par les citoyens riches, ordonna, de son côté, au
greffier de garder le silence. Or, chez les Romains, le tribun qui
interposait son veto contre la loi proposée en arrêtait absolument
l'émission. Gracchus, après avoir éclaté en reproches contre son
collègue, ajourna l'assemblée au lendemain. Il s'entoura d'un appareil
militaire important, dans la vue de forcer Octavius à se contraindre
malgré lui. Il ordonna au greffier d'un ton menaçant de lire la loi à
l'assemblée ; et le greffier se mit à lire. Mais Octavius lui ordonna de
nouveau de se taire, et il obéit. Un combat de propos et d'invectives
réciproques s'engagea soudain entre les tribuns. Le tumulte qui s'y
mêla ne permettant point de mettre la loi en délibération, les grands
conseillèrent aux tribuns de référer de leurs différends au sénat.
Gracchus adopta cette proposition. Il ne doutait pas que les plus
sensés d'entre les sénateurs ne fussent disposés en faveur de la loi. Il
se rendit donc au sénat ; mais dans cette assemblée où l'on était
moins nombreux que dans le Forum, les riches l'attaquèrent de
manière qu'il se retira du sénat, et revint à l'assemblée du peuple, où il
annonça que le lendemain on voterait sur la loi, ainsi que sur la
question de savoir si un tribun qui, comme Octavius, se montrait
l'ennemi des plébéiens, devait conserver ses fonctions. Les choses
effectivement se passèrent de la sorte. Octavius, que rien ne pouvait
intimider, renouvela son opposition à la loi ; et Gracchus fit alors, avant
toute chose, délibérer sur son compte. Après qu'on eut recueilli les
suffrages de la première tribu, qui vota la destitution d'Octavius,
Gracchus se tourna de son côté et l'invita à se départir de son
opposition. Sur son refus, on continua à recueillir les suffrages. Les
tribus étaient alors au nombre de trente-cinq. Les dix-sept premières,
dans leur animosité contre Octavius, avaient été unanimes ; et les
suffrages de la dix-huitième devaient emporter la décision. Gracchus,
encore une fois, se tournant du côté de son collègue, à la vue de
l'assemblée, lui représenta l'extrême danger qui le menaçait ; il le pria
avec instance de cesser de mettre obstacle à la loi la plus sacrée, et
en même temps la plus importante pour toute l'Italie ; de ne pas
contrarier plus longtemps l'intérêt qu'y attachait le peuple, à la cause
duquel sa qualité de tribun lui faisait d'ailleurs un devoir de céder, et de
ne pas braver la condamnation qui allait le dépouiller de sa
magistrature. En terminant ce discours, Gracchus prit les dieux à
témoin que c'était à contre-coeur qu'il provoquait le déshonneur d'un
citoyen, son collègue ; mais Octavius demeura inébranlable ; et l'on
continua de prendre les voix. A l'instant même, le décret du peuple fit
rentrer le tribun dans la condition d'homme privé; et il s'échappa
clandestinement de l'assemblée.
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