Texte grec :
[2,750] τῇ ῥ' οἵγ' αὐτίκα νηὶ διὲξ Ἀχερουσίδος ἄκρης
εἰσωποὶ ἀνέμοιο νέον λήγοντος ἔκελσαν.
Οὐδ' ἄρα δηθὰ Λύκον, κείνης πρόμον ἠπείροιο,
καὶ Μαριανδυνοὺς λάθον ἀνέρας ὁρμισθέντες
αὐθένται Ἀμύκοιο κατὰ κλέος, ὃ πρὶν ἄκουον:
755 ἀλλὰ καὶ ἀρθμὸν ἔθεντο μετὰ σφίσι τοῖο ἕκητι.
αὐτὸν δ' ὥστε θεὸν Πολυδεύκεα δεξιόωντο
πάντοθεν ἀγρόμενοι: ἐπεὶ ἦ μάλα τοίγ' ἐπὶ δηρὸν
ἀντιβίην Βέβρυξιν ὑπερφιάλοις πολέμιζον.
καὶ δὴ πασσυδίῃ μεγάρων ἔντοσθε Λύκοιο
760 κεῖν' ἦμαρ φιλότητι, μετὰ πτολίεθρον ἰόντες,
δαίτην ἀμφίεπον, τέρποντό τε θυμὸν ἔπεσσιν.
Λἰσονίδης μέν οἱ γενεὴν καὶ οὔνομ' ἑκάστου
σφωιτέρων μυθεῖθ' ἑτάρων, Πελίαό τ' ἐφετμάς,
ἠδ' ὡς Λημνιάδεσσιν ἐπεξεινοῦντο γυναιξίν,
765 ὅσσα τε Κύζικον ἀμφὶ Δολιονίην ἐτελεσσαν:
Μυσίδα δ' ὡς ἀφίκοντο Κίον θ', ὅθι κάλλιπον ἥρω
Ἡρακλέην ἀέκοντι νόῳ, Γλαύκοιό τε βάξιν
πέφραδε, καὶ Βέβρυκας ὅπως Ἄμυκόν τ' ἐδάιξαν,
καὶ Φινῆος ἔειπε θεοπροπίας τε δύην τε,
770 ἠδ' ὡς Κυανέας πέτρας φύγον, ὥς τ' ἀβόλησαν
Λητοΐδῃ κατὰ νῆσον. ὁ δ' ἑξείης ἐνέποντος
θέλγετ' ἀκουῇ θυμόν: ἄχος δ' ἕλεν Ἡρακλῆι
λειπομένῳ, καὶ τοῖον ἔπος πάντεσσι μετηύδα:
"Ὠ φίλοι, οἵου φωτὸς ἀποπλαγχθέντες ἀρωγῆς
775 πείρετ' ἐς Αἰήτην τόσσον πλόον. εὖ γὰρ ἐγώ μιν
Δασκύλου ἐν μεγάροισι καταυτόθι πατρὸς ἐμοῖο
οἶδ' ἐσιδών, ὅτε δεῦρο δι' Ἀσίδος ἠπείροιο
πεζὸς ἔβη ζωστῆρα φιλοπτολέμοιο κομίζων
Ἱππολύτης: ἐμὲ δ' εὗρε νέον χνοάοντα ἰούλους.
780 ἔνθα δ' ἐπὶ Πριόλαο κασιγνήτοιο θανόντος
ἡμετέρου Μυσοῖσιν ὑπ' ἀνδράσιν, ὅντινα λαὸς
οἰκτίστοις ἐλέγοισιν ὀδύρεται ἐξέτι κείνου,
ἀθλεύων Τιτίην ἀπεκαίνυτο πυγμαχέοντα
καρτερόν, ὃς πάντεσσι μετέπρεπεν ἠιθέοισιν
785 εἶδός τ' ἠδὲ βίην: χαμάδις δέ οἱ ἤλασ' ὀδόντας.
αὐτὰρ ὁμοῦ Μυσοῖσιν ἐμῷ ὑπὸ πατρὶ δάμασσεν
καὶ Φρύγας, οἳ ναίουσιν ὁμώλακας ἧμιν ἀρούρας,
φῦλά τε Βιθυνῶν αὐτῇ κτεατίσσατο γαίῃ,
ἔστ' ἐπὶ Ῥηβαίου προχοὰς σκόπελόν τε Κολώνης:
790 Παφλαγόνες τ' ἐπὶ τοῖς Πελοπήιοι εἴκαθον αὔτως,
ὅσσους Βιλλαίοιο μέλαν περιάγνυται ὕδωρ.
ἀλλά με νῦν Βέβρυκες ὑπερβασίη τ' Ἀμύκοιο
τηλόθι ναιετάοντος, ἐνόσφισαν, Ἡρακλῆος,
δὴν ἀποτεμνόμενοι γαίης ἅλις, ὄφρ' ἐβάλοντο
795 οὖρα βαθυρρείοντος ὑφ' εἱαμεναῖς Ὑπίοιο.
ἔμπης δ' ἐξ ὑμέων ἔδοσαν τίσιν: οὐδέ ἕ φημι
ἤματι τῷδ' ἀέκητι θεῶν ἐπελάσσαι ἄρηα,
Τυνδαρίδην Βέβρυξιν, ὅτ' ἀνέρα κεῖνον ἔπεφνεν.
τῶ νῦν ἥντιν' ἐγὼ τῖσαι χάριν ἄρκιός εἰμι,
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Traduction française :
[2,750] Ce fut sur ses bords que les Argonautes, voyant le vent qui leur
manquait, mirent pied à terre après avoir doublé le promontoire
Achérusias. La nouvelle de leur arrivée se répandit bientôt dans
le pays; il était gouverné par Lycus, et les Mariandyniens qui
l'habitaient avaient fait longtemps la guerre aux Bébryces.
Instruits par la renommée de la mort d'Amycus, ils
s'assemblèrent autour de Pollux, qu'ils regardèrent comme un
dieu bienfaisant, et voulurent contracter alliance avec ses
compagnons. Ils les reçurent donc dans la ville avec les
témoignages de l'amitié la plus vive, et le jour même le roi leur
donna un festin, pendant lequel l'on s'entretint avec une entière
confiance. Jason racontait à Lycus les noms de tous ses
compagnons, le sujet de leur voyage, l'accueil qu'ils avaient reçu
des femmes de Lemnos, ce qui leur était arrivé à Cyzique,
comment ils avaient laissé sans le savoir Hercule à Cius, l'oracle
de Glaucus, la mort d'Amycus et la défaite des Bébryces, les
malheurs de Phinée, ses prédictions, enfin le bonheur avec lequel
ils avaient franchi les rochers Cyanées et l'apparition d'Apollon
dans l'île de Thyniade.
Lycus écoutait avec plaisir ces récits et plaignit les Argonautes de
n'avoir plus Hercule avec eux : "Mes amis, leur dit-il, quel mortel
vous avez perdu et combien de chemin il vous reste à parcourir
sans lui ! Je connais Hercule, je l'ai vu dans ce palais chez
Dascylus mon père, lorsqu'il traversait à pied l'Asie, emportant
avec lui le baudrier de cette reine des Amazones, la belliqueuse
Hippolyte. A peine sorti de l'enfance, un léger duvet recouvrait
mes joues. Priolas mon frère venait d'être tué en
combattant contre les Alysiens, Priolas, que le peuple pleure
encore et dont il répète sans cesse le nom dans ses lugubres
chants. On célébrait en son honneur des jeux funèbres. Le jeune
Titias effaçait tous les autres athlètes par sa force et par sa
beauté. Hercule le vainquit au combat du ceste et joncha la terre
de ses dents. Voulant ensuite signaler par un exploit éclatant son
amitié pour nous, il soumit au pouvoir de mon père les Mysiens,
les Phrygiens nos voisins et les Bithyniens qui habitent en deçà
de l'embouchure du Rhébas et du rocher de Colone. Les
Paphlagoniens, autrefois sujets de Pélops que le Billéus renferme
dans son cours tortueux, cédèrent également à sa valeur. Tel
était l'empire dont Hercule nous avait rendus maîtres. Mais après
le départ du héros et depuis que je suis sur le trône, les Bébryces
m'ont enlevé la plus grande partie de ces conquêtes et ont
étendu leur injuste domination jusqu'aux rivages du fleuve
Hypius. Enfin, vous m'avez vengé d'eux, et c'est, je l'ose dire, par
une providence particulière des dieux que le fils de Tyndare
a étendu le superbe Amycus à ses pieds afin qu'on vit aussitôt
s'élever ce combat si funeste à nos ennemis. Un tel bienfait
mérite ma reconnaissance et je suis prêt à vous la témoigner de
tout mon pouvoir.
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