Texte grec :
[4,15] Δέκα δὲ τῇ Λευκίππῃ διεληλύθεσαν ἡμέραι τῆς μανίας, ἡ
δὲ νόσος οὐκ ἐκουφίζετο. ἅπαξ οὖν ποτε καθεύδουσα, ταύτην ἀφίησιν
πυρπολουμένην τὴν φωνήν· "Διὰ σὲ μαίνομαι, Γοργία." ἐπεὶ οὖν
ἠὼς ἐγένετο, λέγω τῷ Μενελάῳ τὸ λεχθὲν καὶ ἐσκόπουν εἴ τις εἴη
που κατὰ τὴν κώμην Γοργίας.
προελθοῦσι δ´ ἡμῖν νεανίσκος προσέρχεταί τις καὶ προσαγορεύσας με, "Σωτὴρ
ἥκω σός," ἔφη,
"καὶ τῆς σῆς γυναικός." ἐκπλαγεὶς οὖν καὶ θεόπεμπτον εἶναι νομίσας
τὸν ἄνθρωπον, "Μὴ Γοργίας," εἶπον, "τυγχάνεις;" "Οὐ μὲν οὖν,"
εἶπεν, "ἀλλὰ Χαιρέας· Γοργίας γάρ σε ἀπολώλεκεν."
ἔτι μᾶλλον ἔφριξα καὶ λέγω· "Τίνα ταύτην ἀπώλειαν, καὶ τίς ἐστιν ὁ Γοργίας;
δαίμων γάρ μοί τις αὐτὸν ἐμήνυσε νύκτωρ· σὺ δὲ διηγητὴς γενοῦ
τῶν θείων μηνυμάτων." "Γοργίας ἦν μέν," ἔφη, "Αἰγύπτιος στρα–
τιώτης· νῦν δὲ οὐκ ἔστιν, ἀλλ´ ἔργον γέγονε τῶν βουκόλων. ἤρα δὲ
τῆς σῆς γυναικός·
ὢν δὲ φύσει φαρμακεὺς σκευάζει τι φάρμακον ἔρωτος καὶ πείθει τὸν
διακονούμενον ὑμῖν Αἰγύπτιον λαβεῖν τὸ φάρμακον καὶ ἐγκαταμεῖξαι τῷ
τῆς Λευκίππης ποτῷ. λανθάνει δὲ ἀκράτῳ χρησάμενος τῷ φαρμάκῳ, καὶ
τὸ φίλτρον εἰς μανίαν αἴρεται.
ταῦτα γάρ μοι χθὲς ὁ τοῦ Γοργίου θεράπων διηγήσατο, ὃς ἔτυχεν
αὐτῷ συστρατευσάμενος ἐπὶ τοὺς βουκόλους· ἔσωσε δὲ αὐτόν, ὡς
εἰκός, ὑπὲρ ὑμῶν ἡ Τύχη. αἰτεῖ δὲ χρυσοῦς τέσσαρας ὑπὲρ τῆς
ἰάσεως· ἔχει γάρ, φησίν, ἑτέρου φαρμάκου σκευήν, δι´ οὗ λύσει τὸ πρότερον."
"Ἀλλὰ σοὶ μέν," ἔφην, "ἀγαθὰ γένοιτο τῆς διακονίας· τὸν δὲ ἄνθρωπον,
ὃν λέγεις, ἄγε πρὸς ἡμᾶς." καὶ ὁ μὲν ἀπῆλθεν· ἐγὼ δὲ πρὸς τὸν Αἰγύπτιον
εἰσελθὼν τύπτων τε αὐτὸν πὺξ κατὰ τῶν προσώπων καὶ δευτέραν καὶ τρίτην,
θορυβῶν δ´ ἅμα λέγω· "Εἰπόν, τί δέδωκας Λευκίππῃ, καὶ πόθεν μαίνεται;" ὁ δὲ
φοβηθεὶς καταλέγει πάντα ὅσα ἡμῖν ὁ Χαιρέας διηγήσατο. τὸν μὲν
οὖν εἴχομεν ἐν φυλακῇ καθείρξαντες.
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Traduction française :
[4,15] Dix jours avaient passé depuis que Leucippé
était folle, et la maladie ne s'améliorait pas. Une seule
fois, tandis qu'elle dormait, elle avait dit ces mots en
songe : « C'est à cause de toi que je suis folle, Gorgias. »
Au matin, je rapportai cette parole à Ménélas, et je
m'informai si, dans le village, il y avait un Gorgias.
Comme nous sortions, un jeune homme se présenta à
nous et, s'adressant à moi : « Je viens vous sauver, dit-il,
toi et ta femme. » Je fus stupéfait et crus que cet homme
était envoyé par les dieux. « Tu ne serais pas par hasard,
dis-je, Gorgias ? - Pas du tout, répondit-il, je suis
Chaeréas. Gorgias est celui qui a causé tes malheurs. »
Je frissonnai, à ces mots, et je dis : « De quels malheurs
s'agit-il, et qui est ce Gorgias ? Un dieu m'a appris son
nom cette nuit; et c'est toi, maintenant, l'interprète de
la révélation du dieu. Gorgias était, dit-il, un soldat
égyptien; mais maintenant il n'est plus, et c'est le travail
des bouviers. Il était amoureux de ta femme, et comme,
par nature, il s'y connaissait en drogues, il prépara un
philtre d'amour et persuada à ton serviteur égyptien de
prendre ce philtre et de le verser dans la boisson de
Leucippé. Mais le serviteur, par erreur, employa la
drogue sans la mélanger, et ce philtre eut pour effet de
provoquer la folie. Toutes ces révélations m'ont été
faites hier par le domestique de Gorgias qui participait,
avec lui, à l'attaque contre les bouviers, et, apparemment,
la Fortune l'a sauvé pour votre bien. Il
demande quatre pièces d'or pour la guérir, car il possède,
dit-il, la recette d'une autre drogue grâce à laquelle il
détruira l'effet de la première. - Ah! dis-je, ton entremise
puisse-t-elle te porter bonheur! Conduis-moi donc à
l'homme dont tu parles. » Et il s'en alla. Et moi, j'allai
trouver mon Égyptien et je lui donnai plusieurs coups
de poing dans la figure, et je hurlai : « Dis-moi, qu'as-tu
donné à Leucippé ? Qu'est-ce qui l'a rendue folle ? »
Et lui, terrifié, raconta tout ce que nous avait révélé
Chaeréas. Nous le fîmes alors enfermer en prison, sous
bonne garde.
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